De toutes nos sociétés, certainement celle Mandingue, est la plus martiale dans le respect qu’on doit au grand frère. A tel enseigne qu’on dit par tradition au clair pays, « Ko Allah ka Koroké da, a fana ka doké da ». ce qui veut dire que DIEU a crée le grand frère qui à son tour, a crée son petit frère. Le Président Ahmed Sékou Touré, est un bel exemple de cette vérité dans la savane. Craint à la limite de l’adoration, il était entièrement soumis à l’Autorité de son Grand Frère Elhadj Amara Touré, le Patriarche de la Famille à Faranah ou il était le Secrétaire Fédéral du Parti. Tous les fonctionnaires en service, et tous ceux qui comptaient qui passaient par là, s’imposaient le devoir de lui rendre une visite de courtoisie. Et d’autres, qui avaient des problèmes de tous ordres, venaient le voir afin de le voir intercéder auprès de son petit frère de Président. Mieux, Elhadj Amara Touré qui aimait souvent dire que Ahmed Sékou Touré commande à Conakry et lui à Faranah. Lui-même lors de ses visites dans sa ville natale, ôtait ses chaussures à la véranda de la maison de son grand frère et était pris à partie par ses belles-sœurs auxquelles, il répondait par des tapotes à l’épaule et des sourires. Celui qui avait dit non au Général De Gaulle le 25 Aout 1958, n’était ici chez son grand frère, un simple membre de la famille à qui, tous les ordres pouvaient être donnés sans demander son avis au préalable. Même ceux qui concernaient l’Etat. Et le Président qui ne montrait aucun signe d’insubordination, n’était pas au bout de ses peines. Car, des vieilles femmes avaient fait leurs sacs et l’attendaient à l’aéroport pour venir à Conakry avec lui pour lui faire du TO, disaient-elles.
Il ordonnait de les embarquer dans son avion dans une détente familiale qui dépasse l’entendement. Et lorsqu’elles souhaitaient rentrer à Faranah, c’est l’avion présidentiel qui les ramenaient avec beaucoup de présents et la fierté detre les mères du Président Ahmed Sékou Touré. je vais prendre trois exemples qui illustrent ce respect religieux que le Président Ahmed Sékou Touré, avait pour son grand frère Elhadj Amara Touré. Un magasinier d’une Entreprise d’Alimentation Générale, avait détourné des sacs de riz et d’autres denrées qui avaient donnés à des parents et amis.
C’était un bon vivant et reconnu pour sa générosité. Il fut arrêté, jugé et condamné à aller purger sa peine à Gueckedou. Il quitta Conakry sous bonne escorte policière. Arrivé à Faranah, ses convoyeurs s’arrêtèrent pour saluer Elhadj Amara Touré. lui resta menotté dans la Land rover qui le transportait. Il en profita pour descendre et ruer par terre en sanglots. Ce qui attira l’attention de tous les visiteurs, les voisins et bien entendu le Maitre des Lieux. Ce dernier ordonna aussitôt aux policiers d’enlever les menottes aux poignets du prisonnier et de le faire rentrer au salon. Ce qui fut fait à la vitesse de l’éclair.
Alors Elhadj Amara Touré questionna l’infortuné qui reconnut sa forfaiture tout en déclinant son identité et celle de son père qui était un vieil ami du frère ainé du Président Ahmed Sékou Touré. il demanda alors aux policiers de retourner à Conakry et de le laisser son fils qu’il venait de retrouver à qui il demanda de se reposer avant de continuer le lendemain dans son village pour voir ses parents. Son retour à Conakry se ferait ultérieurement.je rappelle que cette histoire m’a été rapportée par l’intéressé en personne et que je ne cite pas par respect dans la protection des sources.
Le deuxième exemple concerne le Tout-Puissant Ministre Ismael Touré le frère cadet du Président Ahmed Sékou Touré avec il a souvent entretenu des relations tendues, au point qu’il prit la décision de le suspendre à la fois du Bureau Politique National et du Gouvernement. L’acte du Pouvoir Central comme on le disait à l’époque, est même lu sur les antennes de la « Voix de la Révolution ». Ismael Touré prend sa voiture et rentre tranquillement à Faranah ou le Grand Frère et Patriarche de la Famille, est mis au courant. Séance tenante, Elhadj Amara Touré convoque le Président Ahmed Sékou Touré à Faranah. Il s’y rend aussitôt. Et à l’issue de la réunion de famille qu’il préside naturellement, le linge sale est lavé, le petit frère est rétabli dans toutes ses fonctions. C’est de là d’ailleurs qu’ordre a été donné de diffuser le communiqué y afférent, sur les mêmes antennes de la « Voix de la Révolution ».
la famille vient d’avoir raison sur le Parti et l’Etat grâce au droit d’ainesse qui est sacré au Manding. Le troisième et exemple concerne le cas du Ministre de la Santé Docteur Bah Caba et le Secrétaire d’Etat aux Travaux Publics, Cellou Bamba Diallo. Ce dernier devait d’ailleurs sa promotion au fait qu’il avait servi à Faranah et avait réalisé avec succès, les voiries urbaines de la ville. Ce qui lui avait valu, une grande admiration de Elhadj Amara Touré dont il était un des permanents visiteurs. Sa nomination serait pour certains, une recommandation expresse de son « tuteur ».
Mais cela ne lui évitera pas une sanction pour laquelle Elhadj Amara Touré avait obtenu la levée, contrairement à son compagnon d’infortune Docteur Bah Caba qui, dans sa fierté de Toucouleur n’entreprit aucune démarche pour être réhabilité. Il eut raison. Car, pas un mois ne passa, le Président Ahmed Sékou Touré décéda à Cleveland aux Etats-Unis le 26 Mars 1984 et les militaires s’emparèrent du pouvoir le 3 Avril. Tous les dignitaires du régime ainsi que les membres de la famille du Président, furent arrêtés et jetés en prison, y compris Elhadj Amara Touré. Cellou Bamba Diallo, son protégé également. Docteur Bah Caba, fut confirmé Ministre de la Santé par le nouveau pouvoir.
A SUIVRE
Amadou Diouldé DIALLO